1185. Dans la Jerusalem tenue par les Croisés, une paix fragile
s'est installée entre le roi Baudouin IV et le Sultan Saladin, qui ensemble font ce qu'ils peuvent pour la préserver. De retour en France, le vieillissant Seigneur Croisé Godefroy s'arrête chez Balian, forgeron d'un petit village : cet homme est le fils qu'il n'a jamais assumé. A son tour de prendre le chemin de Jérusalem pour prendre sa succession. Mais Balian n'en a que faire et ne se soucie que peu de la Guerre Sainte, lui qui pleure sa femme suicidée. La force des choses jouera contre lui : ayant tué un prêtre sur un coup de colère, il se voit contraint de suivre ce père qu'il n'a jamais connu en Terre Sainte, afin d'expier sa faute, racheter l'âme de sa femme et se faire oublier. A la mort de Godefroy, nommé chevalier et héritant d'un domaine, il se consacre un temps à la terre et en profite pour faire de l'oeil à la Princesse Sybille. Mais les Chrétiens sont en mal de belligérances, et la mort de Baudouin IV, malade de la lèpre, annonce la fin de la trêve...
En cette année 2005, qui entre deux remakes mous nous
gratifie d'un Scorsese , du come-back de quelques réalisateurs d'importance et de la fin d'une saga légendaire, il ne manquait qu'un Ridley Scott pour que la fête soit complète. En guise de carton d'invitation, rien de moins qu'un film d'aventure historique sur une période chichement traitée sur grand écran : les Croisades. Excitant projet qui fut jadis dans les mains de Paul Verhoeven, Kingdom of Heaven réunit dépaysement, batailles gigantesques et casting de choix. Jugez plutôt, nous retrouvons entre autre Jeremy Irons, Liam Neeson, Martin Sheen, Edward Norton et dans le rôle principal, Orlando Bloom, ex-Elfe (Lord of the ring), ex-pirate (Pirates des Caraïbes), ex-Troyen (Troy), que la barbe de trois jours et les cheveux au vent transforment en sosie d'Aragorn. Ne tournons pas autour du St Graal, Kingdom of Heaven sur le papier comme à l'écran est une bonne grosse production, qui s'est donnée les moyens d'être soignée, prenante et divertissante. Un casting confirmé, un thème qui ne laisse pas indifférent, mais un scénario pas vraiment extraordinaire ? Qu'à cela ne tienne, celui qui tient la barre est un réalisateur capable de nous faire gober les choses les plus improbables. Car Ridley Scott est avant tout un homme qui aime les imageries et les plans qui marquent. De fait, le moindre mouvement prend sous sa caméra une dimension épique, où se mesure le courage, la vaillance, la passion et le rictus de dédain face à une mort rapide. Quitte à en rajouter, pour le plaisir du spectateur, à l'image de cette escarmouche où un Allemand vigoureux, une flèche en travers de la gorge, prendra le temps d'étriper sauvagement trois malandrins avant de rendre le dernier soupir (scène qui n'était pas sans rappeler Gladiator du même Scott). Tout le film baigne dans cette atmosphère, dans cette volonté farouche de magnifier l'instant présent. Le sang ne gicle pas autrement qu'en gerbes excessivement classieuses, soulignées par un beau ralenti, les bombardements à la catapulte lancent des pierres enflammées dans la nuit (scène de bataille anthologique qui restera dans les mémoires), la musique judicieusement choisie transforme le tout en ballet tragique (et pathétique). Peu de scènes de batailles en fait, mais bien disséminées et plutôt bien fichues, souvent filmées dans un style documentaire pris sur le vif qui peut rebuter mais ont le mérite d'être lisibles. Balian passe de Maître Forgeron à Maître Lame après deux minutes d'escrime désastreuse ? La romance entre notre héros et la jolie princesse forcée de se marier à un pleutre fait office de cliché prévisible ? Qu'importe, plein les yeux, plein les oreilles, de l'amour, de la bravoure, de beaux face-à-face, une poignée de phrases immortelles pour se donner du courage et quelques combats pour relier le tout : Kingdom of Heaven fait oublier ses faiblesses d'écritures pour une efficacité et un agréable tape à l'oeil.
Ciné Phil, aidé par Lestat (Auteur/Peplum ; 21 mai 2005)
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